Salon / Delamotte : deux maisons au service du Chardonnay

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Champagne iconique, au même titre que le célèbre Petrus à Bordeaux ou le domaine de la Romanée Conti en Bourgogne, Salon aime cultiver le mystère et l’art de la discrétion. Grappers s’est rendu à Mesnil-sur-Oger, là où tout a commencé.  

Pénétrer chez Salon, c’est toucher du doigt ce qui se fait de mieux en Champagne. Chaque sommelier, caviste, collectionneur averti, rêve de goûter un jour ce champagne d’exception. Si Salon est une icône, c’est avant tout pour sa rareté. Depuis sa création en 1905, seulement 42 millésimes sont sortis des caves de Mesnil-sur-Oger. Comment définir ce champagne si complexe ? Pour Didier Depond, président de Salon/Delamotte depuis 1997, « Salon est avant tout un grand vin blanc. Un vin de Champagne, avec une texture en bouche d’une rare finesse. »

Le chardonnay, provenant uniquement du Mesnil-sur-Oger, est planté à mi-pente sur des sols crayeux. Cette craie gorgée d’eau se retrouve en bouche et exprime sa fraîcheur et une vive tension.

Fait rare en Champagne, les vins de Salon reposent minimum dix ans en cave après leur mise en bouteille. A propos de l’élevage des vins, ne parlez pas de fût à Didier Depond : « Tant que je serai présent au sein de Salon/Delamotte, il n’y aura pas de passage sous-bois sur toutes les cuvées. Le Chardonnay du Mesnil comme je le conçois doit être vif, tendu et droit » précise-t-il avec ce sourire qui ne le quitte jamais. « Si Michel Fauconnet (Chef de Caves de la maison) et moi-même considérons à la dégustation des vins clairs que le potentiel n’est pas à la hauteur, on ne millésime pas » explique Didier Depond. Les jus viennent alors enrichir la maison Delamotte, sa sœur de prestige.

Afin de comprendre ce qui fait l’identité de ce champagne de prestige, il faut remonter au début du siècle dernier. Qui n’a jamais rêvé de produire son propre champagne, uniquement pour sa consommation personnelle et sans la moindre idée de profit ? Aimée-Eugène Salon était de ceux-là, un précurseur à l’époque. Champenois de naissance, mais parisien la semaine, il travaillait pour la maison Chapal, spécialisée dans la fourrure de lapin. C’est grâce à son beau-frère, Marcel Guillaume, qu’il décide d’acquérir quelques parcelles de chardonnay sur la commune du Mesnil-sur-Oger, au cœur de la Côte des Blancs. À la mort de son fondateur (1943), la maison est vendue à plusieurs reprises et perd peu à peu son identité.

C’est en 1988 qu’une nouvelle page va s’écrire par l’intermédiaire d’un homme éminemment respecté : Bernard de Nonancourt (1920-2010). Didier Depond ne tarit pas d’éloges sur celui qui l’a fait rentrer chez Laurent Perrier à seulement 22 ans. « A l’époque, je ne connaissais rien au champagne. Bernard m’a tout appris, je le considère comme un second père, » se souvient le petit-fils de vignerons tourangeaux. Président des Champagnes Laurent-Perrier pendant 50 ans, cet ancien membre de la résistance française fût chargé d’inventorier la cave personnelle d’Adolf Hitler. Quelle ne fût pas sa surprise de découvrir, au moment de pénétrer les lieux, plusieurs bouteilles de Salon 1928 ! Ce souvenir le poursuivra jusqu’au rachat de la maison, 43 ans plus tard. Les Champagnes Delamotte appartenaient déjà à la famille Nonancourt. Elle rejoindra le groupe Laurent-Perrier en 1988.

Malgré un recul des ventes de champagnes de 18 % sur l’année 2020, l’avenir de Salon/Delamotte s’annonce radieux. Vendu majoritairement à l’export avec une demande croissante venue de l’Asie, les « épicurieux » déçus devront patienter pour espérer goûter un jour ce précieux champagne.

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