Champagne et Dessert : les tips de Philippe Jamesse

Grappers-champagne-dessert

Pendant 18 ans, Philippe Jamesse a travaillé aux côtés de Chefs talentueux la précision des accords champagne-dessert. Pour Grappers, il nous livre quelques règles à respecter.

Au restaurant, quand il s’agit de marier un champagne avec un dessert le résultat est souvent le même : le sommelier privilégie la facilité. Un champagne rosé pour accompagner un dessert aux fruits rouges. Une absence d’engagement de la part d’une profession qui préfère servir d’autres boissons. Pourtant le champagne offre un champ des possibles immense.
Aujourd’hui retiré du monde de la sommellerie, mais jamais à court de projets (il prépare un livre sur le bois et le champagne prévu pour la rentrée prochaine), Philippe Jamesse nous parle la relation que le sommelier doit entretenir avec son Chef de cuisine : « Elle est capitale. Si vous travaillez aux côtés d’un Chef créatif, qui s’impose une exigence au quotidien, vous devez vous mettre au même niveau. La cuisine de Phillipe (ndlr Philippe Mille, Chef actuel des Crayères à Reims) est d’une pureté sans égal. À la façon d’un Chef de cave, qui va être capable d’assembler plusieurs vins tranquilles pour obtenir un profil de champagne, il est capable d’élaborer une recette où chaque ingrédient donne naissance à une harmonie des saveurs. Au cours de mon expérience aux Crayères, j’ai beaucoup appris à ses côtés. »

« La cuisine communique de moins en moins avec la salle, il n’y a pas de réflexion poussée sur la recherche possible d’un accord avec un dessert »

Après ce bel hommage rendu, Philippe Jamesse décrit avec précision sa relation de travail avec son Chef de l’époque : « Je prenais le soin de goûter le dessert et d’en comprendre la construction. Quelles sont les saveurs qui dominent ? Le sucré, l’amer, l’umami. Pour trouver un accord idéal, il faut renouer avec les goûts essentiels du dessert, souligne le sommelier. Si votre dessert joue avec l’amertume d’un chocolat puissant, allez chercher un rosé de saignée pour retrouver le goût essentiel de cette caresse sucrée. » Rappelons qu’un champagne rosé dit de saignée, est un vin où les moûts de raisins ont macéré pendant quelques heures avec les peaux. Cette technique de vinification offre au vin une structure tanique, de l’amertume ainsi que de la gourmandise.

Le constat est cinglant. Après avoir contacté de nombreux sommeliers travaillant dans de prestigieux palaces parisiens pour savoir quel était leur accord champagne/dessert idéal ? La même réponse remontait à mes oreilles : « Je suis désolé, mais nous proposons uniquement le champagne à l’apéritif. » Pour Philipe Jamesse, l’époque a changé : « La cuisine communique de moins en moins avec la salle, il n’y a pas de réflexion poussée sur la recherche possible d’un accord avec un dessert. Dans les foyers, les familles s’éclatent et font preuves d’audace avec des accords surprenants, mais dans les restaurants de nombreux sommeliers ne maitrisent pas les quatre saveurs et prône la facilité. »

Il poursuit sa réflexion : « La force du champagne réside dans sa diversité, elle profite pleinement du réchauffement climatique. Aujourd’hui, on ne compte plus les vignerons qui choisissent méticuleusement leurs parcelles et leur date de vendanges. On privilégie la maturité pour aller chercher le croquant du fruit et moins l’acidité. Grâce à la montée des températures, la personnalité des champagnes s’affirme d’avantage et l’équilibre sucre/pureté est renforcé. »
Dans une société où l’on communique à grands renforts de campagnes publicitaires le message « Moins de sucres », les champagnes suivent cette tendance et le nombre de champagnes zéro dosage et d’extra brut a considérablement augmenté ces dernières années. 

Philippe Jamesse invite le sommelier dans la réflexion de son accord à suivre cette tendance : « Si le dessert proposé est peu sucré, il ne faut surtout pas amener un champagne avec un dosage supérieur à 6g/L ». Autre conseil apporté par notre fin connaisseur : « Si vous voulez trouver un accord sur un dessert praliné avec des noisettes à la façon d’un Paris-Brest, allez chercher un champagne vinifié sous-bois avec une chauffe légère pour retrouver ces notes délicates de torréfactions ».
Qu’en est-il des vieux champagnes ? « Les champagnes qui prennent de l’âge perdent de l’effervescence mais gagnent en complexité aromatique. Les notes mellifères qui se développent avec le temps s’associent à merveille avec un dessert autour du miel. » Des conseils précieux qu’ils nous tardent de mettre en application.

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